J'irai voir s'il existe encore des vivants
Alors, j'ai dit: Non. Je n'attraperai pas le désespoir comme on attrape une maladie. Je me lèverai. Et j'irai.
Je ne renoncerai pas. Je ne fermerai pas les yeux. J'avais appris que si je me laissais glisser à fermer les yeux rien qu'un instant j'étais perdu.
Non. Je resterai debout, je me battrai, même contre moi-même. Je ne veux pas que ce monde me rende aveugle ni sourd. Ni boiteux. Ni muet. Ni mort.
Je ne veux pas mourir. Je ne veux pas. Je ne veux pas. Je ne veux pas devenir une poubelle. Je ne veux pas cesser d'être un homme.
Je ferai un pélerinage aux quatre horizons du monde. J'irai voir si l'eau coule encore aux fontaines et si le soleil sait encore dessiner son ombre. J'irai voir si sur cette terre, il existe encore des vivants, s'ils répondent encore à des noms d'homme et de femme, si on peut leur toucher la main, et si leur main garde encore la chaleur.
J'irai, et je leur poserai des questions. Je les presserai de questions jusqu'à ce que sorte la réponse. Et je ferrai bien ce qu'ils me répondront.
Pierre Imberdis